Références de l’arrêt
Cour d’appel de Montpellier, 9 octobre 2025, n°24-02868
Le principe dégagé par l’arrêt
L’agence immobilière ne peut prétendre à une indemnisation si elle ne rapporte pas la preuve que le vendeur avait connaissance de la présentation du bien à l’acquéreur.
La signature du bon de visite par le seul acquéreur ne suffit pas : en l’absence de contre-signature du vendeur ou de dénonciation de la visite, les honoraires de l’agence ne sont pas sécurisés.
Les faits
Un candidat acquéreur visite un bien immobilier par l’intermédiaire d’une agence et signe un bon de visite.
Peu après, la vente est conclue en direct entre le vendeur et cet acquéreur, sans intervention de l’agence.
L’agence, estimant avoir présenté l’acquéreur au vendeur, réclame des dommages et intérêts correspondant à la perte de ses honoraires.
La procédure
Déboutée en première instance, l’agence interjette appel.
Elle soutient que la signature du bon de visite par le candidat acquéreur suffit à démontrer qu’elle a rempli sa mission et que la vente ultérieure en direct constitue une manœuvre frauduleuse du vendeur et de l’acquéreur.
La question principale de droit
La signature du bon de visite par le vendeur est-elle nécessaire pour prouver que ce dernier a eu connaissance de la présentation du bien par l’agence, et ainsi sécuriser le droit à rémunération de cette dernière ?
La solution des juges
La cour d’appel de Montpellier confirme le rejet de la demande de l’agence :
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Aucun élément ne prouvait que le mandant (vendeur) avait eu connaissance de la présentation du bien à cet acquéreur.
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L’agence n’avait pas dénoncé la visite au vendeur, alors même que le bon de visite était signé par l’acquéreur.
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Plus encore, la « reconnaissance de présentation du bien immobilier » comportait un emplacement prévu pour la signature du vendeur, resté vierge.
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Pour les juges, il est inexplicable que l’agence n’ait pas fait contresigner ce document par le vendeur, ce qui aurait permis de rapporter la preuve du lien entre la visite et la vente.
La circonstance que le vendeur n’était pas présent lors de la visite est sans incidence : l’agence devait malgré tout lui dénoncer la visite par tout moyen.
Enseignements pour les professionnels de l’immobilier
1️⃣ La signature du bon de visite par le vendeur est une garantie précieuse
La contre-signature du vendeur atteste qu’il a été informé de la présentation du bien à un acquéreur déterminé.
Elle facilite la preuve en cas de vente conclue ultérieurement sans l’agence et permet de faire jouer la clause pénale du mandat.
2️⃣ En l’absence du vendeur lors de la visite, la dénonciation est impérative
Si le mandant n’est pas présent lors de la visite, l’agence doit dénoncer la visite par écrit (courriel, lettre recommandée, SMS, etc.).
Cette formalité simple peut éviter toute contestation ultérieure.
3️⃣ Un bon de visite signé par le seul acquéreur est insuffisant
Il ne prouve que la présentation du bien à l’acquéreur, pas la connaissance du vendeur.
Or, sans cette preuve, la jurisprudence considère que l’agence ne démontre pas l’exécution de sa mission au sens de l’article 6 de la loi Hoguet.
À retenir
Pour sécuriser ses honoraires, l’agent immobilier doit impérativement faire contresigner le bon de visite par le vendeur ou lui dénoncer la visite par tout moyen.
À défaut, la signature du seul acquéreur ne suffit pas à établir la présentation du bien au vendeur.
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