Garantie des vices cachés : la connaissance du vendeur neutralise la clause d’exonération

Publié le 17 août 2025 à 00:06

Cass. 3e civ., 5 juin 2025, n° 23-14.619, n° 296 D

Le principe dégagé par l’arrêt

Le vendeur d’un immeuble qui connaît l’existence d’un vice au moment de la vente est tenu à la garantie des vices cachés, même si une clause d’exonération figure à l’acte (art. 1643 du code civil).

Les faits

Quelques semaines après l’acquisition d’une maison, les acheteurs découvrent des infiltrations d’eau au sous-sol (flaque au sol et traces d’humidité sur les murs).
Une expertise judiciaire confirme l’existence de désordres d’infiltration. Les acquéreurs assignent la venderesse en indemnisation sur le fondement de la garantie des vices cachés.

La procédure

  • En première instance et en appel, la demande est rejetée.

  • Les juges retiennent que la venderesse n’avait pas dissimulé de vice déterminant du consentement, se fondant sur un sinistre déclaré 8 ans auparavant à l’assureur dommages-ouvrage. Ce dommage avait été qualifié par l’assureur de « désordre esthétique ».

  • Une clause de non-garantie des vices cachés insérée dans l’acte de vente est jugée opposable aux acquéreurs.

La question de droit

Un vendeur peut-il s’exonérer de la garantie des vices cachés lorsqu’il a eu connaissance d’un sinistre antérieur, même si ce dernier avait été présenté comme un simple désordre esthétique par l’assureur ?

La solution de la Cour de cassation

La Cour casse la décision d’appel.
Elle relève que :

  • Le sinistre déclaré à l’assureur ne portait que sur des tâches d’humidité esthétiques.

  • Mais l’expert missionné par l’assureur avait identifié un désordre d’infiltrations affectant des travaux réalisés par la venderesse, non couverts par l’assurance.

Dès lors, la venderesse avait connaissance d’un vice réel lors de la vente. En application de l’article 1643 du code civil, la clause d’exonération ne peut pas jouer : le vendeur est tenu à garantie.

Enseignements pour les professionnels de l’immobilier

  • La portée des clauses de non-garantie est limitée : elles ne protègent pas le vendeur qui avait connaissance du vice au moment de la vente.

  • La déclaration d’un sinistre antérieur ne suffit pas à écarter la mauvaise foi du vendeur, surtout si un expert avait déjà identifié un désordre sérieux.

  • Les agents immobiliers doivent alerter leurs clients vendeurs : toute connaissance d’un problème, même ancien ou déclaré à une assurance, doit être communiquée à l’acquéreur.

  • Les acquéreurs disposent d’un fondement solide pour agir, même en présence d’une clause d’exonération.

  • Les syndics et administrateurs de biens doivent également être attentifs à la traçabilité des sinistres (déclarations DO, expertises, interventions antérieures) pour éviter toute contestation ultérieure.

👉 En clair, la mauvaise foi prime sur la clause : un vendeur qui connaît un vice caché ne peut jamais s’en exonérer.

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