
Cour d’appel de Rennes, 1re chambre, 29 avril 2025, n° 24/00066
✅ Le principe dégagé par l'arrêt
L’agent immobilier engage sa responsabilité s’il omet d’informer les acquéreurs d’une servitude connue et s’il ne procède pas à un minimum de vérifications sur la véracité des déclarations relatives aux travaux. Il est tenu à un devoir de conseil rigoureux, dont la violation peut justifier une indemnisation majoritaire à sa charge.
📌 Les faits
Une promesse de vente est conclue entre des vendeurs et des acquéreurs, par l’intermédiaire d’une agence immobilière. Quelques jours avant la signature de l’acte authentique, le notaire transmet aux parties un projet d’acte pour la première fois.
Les acquéreurs y découvrent deux éléments majeurs, absents du compromis :
-
l’existence d’une servitude non aedificandi grevant le terrain,
-
des travaux récents (piscine, ravalement, baies vitrées), alors même que le compromis stipulait qu’aucune construction n’avait été entreprise depuis plus de dix ans.
Estimant avoir été trompés, les acquéreurs renoncent à la vente.
⚖️ La procédure
En première instance, le tribunal donne raison aux acquéreurs en condamnant uniquement les vendeurs.
Ces derniers interjettent appel afin d’obtenir la reconnaissance de la responsabilité conjointe de l’agence immobilière et du notaire.
❓ La question principale de droit
L’agent immobilier est-il responsable envers les acquéreurs pour avoir manqué à son devoir d’information et de conseil, en n’intégrant pas une servitude connue au compromis et en omettant de vérifier des déclarations manifestement inexactes ?
🧑⚖️ La solution des juges
La cour d’appel retient la responsabilité de l’agence immobilière, à hauteur de 80 %, pour deux manquements caractérisés :
-
Omission d’information sur une servitude connue :
L’agence avait en sa possession, depuis plus d’un mois, un certificat d’urbanisme mentionnant une servitude non aedificandi, qu’elle n’a pourtant pas intégrée au compromis. -
Absence de vérification des travaux récents :
Les aménagements (piscine, ravalement, baies vitrées) étaient visibles, et en contradiction avec les déclarations du compromis. L’agence n’a effectué aucune vérification ni émis la moindre alerte.
La faute du notaire est également reconnue, mais dans une moindre mesure (20 %), pour avoir transmis le projet d’acte trop tardivement, sans laisser aux acquéreurs le temps nécessaire pour prendre une décision éclairée.
🧠 Enseignements pour les professionnels de l’immobilier
Cet arrêt rappelle avec force les exigences du devoir de conseil pesant sur les agents immobiliers :
✅ Vérifier les informations fournies
Une déclaration du vendeur ne suffit pas : l’agent doit procéder à des vérifications élémentaires, notamment en cas de signes visibles ou documents disponibles (permis de construire, certificat d’urbanisme, etc.).
✅ Anticiper et prévenir
Toute anomalie ou information sensible (servitude, incohérence, travaux récents) doit être révélée aux parties dès le compromis, sous peine d’engager la responsabilité de l’intermédiaire.
✅ Coopération avec le notaire
Même si le notaire reste le garant de la validité juridique de l’acte, l’agence joue un rôle déterminant en amont dans la sécurisation de la vente. Un défaut de vigilance peut lui coûter cher.
🔎 Professionnels : pour sécuriser vos transactions, intégrez systématiquement l’analyse des documents d’urbanisme et des éléments apparents dans vos process.
Ajouter un commentaire
Commentaires