🏦 Annulation de la vente pour dol : la banque peut être indemnisée après l’anéantissement du prêt immobilier

Publié le 31 juillet 2025 à 02:11

(Cass. 3e civ., 5 juin 2025, n° 23-14.493, n° 284 F-D)

✅ Principe dégagé

Lorsqu’un prêt immobilier est anéanti du fait de l’annulation d’une vente pour dol, la banque prêteuse est fondée à obtenir réparation du préjudice subi, notamment :

  • la restitution des intérêts échus,

  • la perte de chance de percevoir les intérêts à échoir,

  • et le remboursement des frais liés à l’acte de prêt.

Le capital prêté, en revanche, ne peut jamais être réclamé au vendeur.

📚 Faits

Un couple acquiert, en VEFA, une maison meublée en résidence de tourisme, avec une promesse de bail commercial au profit d’un exploitant.
L’opération est financée en partie par un crédit immobilier.

Constatant une rentabilité inférieure aux attentes, les acquéreurs invoquent un dol du vendeur et obtiennent en justice :

  • l’annulation de la vente,

  • et la résolution corrélative du prêt.

⚖️ Procédure

La banque prêteuse demande à être indemnisée par le vendeur fautif pour le préjudice lié à l’anéantissement du prêt :

  • intérêts échus non perçus,

  • perte de chance de percevoir les intérêts futurs,

  • frais engagés.

Les juges du fond rejettent la demande, estimant que, sur le fondement de l’article 1240 du Code civil (ex-1382), seule la partie de bonne foi au contrat annulé (ici les acquéreurs) peut demander réparation du préjudice.

🔎 Solution de la Cour de cassation

La Cour de cassation censure cette position :
Les juges du fond ont à tort écarté l’indemnisation de la banque, en ne prenant pas en compte l’existence et la nature de son préjudice réel.

La nullité rétroactive de la vente entraîne l’anéantissement du prêt accessoire, et cause un préjudice spécifique à la banque, distinct de celui des emprunteurs.

La banque peut donc demander :

  • la restitution des intérêts échus,

  • une indemnisation de la perte de chance de percevoir les intérêts à échoir,

  • la restitution des frais liés à l’acte de prêt.

Cette solution confirme une jurisprudence antérieure (Cass. 3e civ., 1er juin 2017, n° 16-14.428).

⚠️ Une limite importante : le capital prêté

La banque ne peut jamais réclamer le remboursement du capital au vendeur, même s’il a perçu les fonds directement.
👉 Cette obligation pèse exclusivement sur l’emprunteur, conformément à une jurisprudence constante (Cass. 3e civ., 20 mars 2025, n° 23-14.445, 23-14.446, 23-14.350).

🎯 Enseignements pratiques pour les professionnels de l’immobilier

  • ✅ Une vente annulée pour dol peut engager la responsabilité délictuelle du vendeur vis-à-vis de la banque prêteuse.

  • 💼 Les établissements de crédit doivent être vigilants dans les montages incluant VEFA + bail commercial, souvent à haut risque de contentieux.

  • 📌 La nullité du prêt accessoire n’efface pas les préjudices économiques subis par la banque : intérêts perdus, frais engagés, manque à gagner.

  • 📎 Cette décision souligne également la nécessité pour les notaires, conseils et rédacteurs d’actes de sécuriser les opérations immobilières complexes, en informant toutes les parties des risques associés à la nullité.

🔎 Références

  • Cass. 3e civ., 5 juin 2025, n° 23-14.493, n° 284 F-D

  • Cass. 3e civ., 1er juin 2017, n° 16-14.428

  • Cass. 3e civ., 20 mars 2025, nos 23-14.445, 23-14.446, 23-14.350

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