L’agent immobilier qui vend un bien à titre personnel peut-il bénéficier d’une clause exclusive de la garantie des vices cachés ?

Publié le 17 octobre 2024 à 02:24

Il s'agit d'un arrêt de la Cour de cassation du 17 octobre 2024, n° 22-22.882


Le principe :

La garantie des vices cachés (art. 1641 et s. du Code civil) ne peut être invoquée par un vendeur professionnel, sur lequel pèse une présomption irréfragable de connaissance des vices, à moins que l’acquéreur ne soit lui-même un professionnel de la même spécialité.

 

La question : 

Mais qu’en est-il lorsque le vendeur est un agent immobilier qui vend un immeuble lui appartenant à un acquéreur profane ?

 

Les faits :

  • Un couple (M. et Mme J.) vend une maison qu’ils ont achetée en 2014, après des travaux et une revente rapide, motivée par des raisons personnelles (santé).
  • Une clause d'exclusion de garantie des vices cachés figure dans l’acte de vente.
  • Les acheteurs découvrent des désordres (isolation et performance énergétique) et attaquent les vendeurs en garantie des vices cachés, en s’appuyant sur le fait que M. J. est agent immobilier.


La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel en ces termes :

- La cour d’appel a relevé que le projet initial des vendeurs était l’achat d’un bien immobilier en vue de sa location ;

- Qu’ils n’avaient procédé à sa revente (rapide) après travaux qu’en raison de l’état de santé de M. J. (en réalisant une plus-value limitée) 

- Et qu’il s’agissait d’une opération isolée de gestion de leur patrimoine privé. 

 

Elle a pu déduire de ces seuls motifs que les vendeurs n’étaient pas des vendeurs professionnels, peu important que celui-ci ait été agent ou négociateur immobilier (M. J. était négociateur salarié, en l’espèce), de sorte qu’ils pouvaient se prévaloir de la clause de non-garantie des vices cachés.

 

Cet arrêt offre plusieurs enseignements pour les agents immobiliers :

 

1. Distinction entre vendeur professionnel et particulier :

L’agent immobilier n’est pas automatiquement considéré comme un vendeur professionnel lorsqu’il vend un bien de son patrimoine privé. Ce statut dépend de l’intention et du contexte de la vente.

 

2. Critères d’évaluation :

La Cour examine :

L’objectif initial d’acquisition (gestion du patrimoine privé ou activité commerciale).

La nature de l’opération (vente isolée et circonstancielle vs activité habituelle).

La revente rapide pour des raisons personnelles (ex : santé) n’implique pas automatiquement une activité professionnelle.

 

3. Clause de non-garantie des vices cachés :

Même si l’agent immobilier est vendeur, il peut bénéficier de cette clause s’il agit à titre privé.

 

4. Prudence dans la rédaction des actes :

Il est crucial de préciser clairement dans l’acte de vente que la transaction s’inscrit dans une gestion de patrimoine personnel pour éviter toute requalification en tant que professionnel.

 

En résumé, la Cour rappelle que le statut professionnel de l’agent immobilier ne s’étend pas systématiquement aux ventes de biens personnels.

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