
Le Conseil d’État rappelle la possibilité pour l’administration de retirer sans délai un permis frauduleux
📚 Références de l’arrêt
Conseil d’État, 31 juillet 2025, n° 498089, Commune de Courchevel
À rapprocher de CE, 23 octobre 2020, n° 425457 (permis délivré sous réserve du droit des tiers)
⚖️ Principe dégagé par l’arrêt
Lorsqu’un permis de construire a été obtenu par fraude, l’administration peut procéder à son retrait sans condition de délai, dès lors qu’elle apporte la preuve de l’intention du pétitionnaire de la tromper sur un élément déterminant — en l’occurrence, sa qualité pour déposer la demande.
đź“„ Faits
Un copropriétaire d’un immeuble situé dans la commune de Courchevel a déposé une demande de permis de construire pour réaliser des travaux affectant les parties privatives d’autres copropriétaires. Pour appuyer sa demande, il a produit un document affirmant qu’il disposait de l’autorisation de l’ensemble des copropriétaires, alors qu’aucune assemblée générale n’avait accordé cette autorisation.
Le permis de construire a été délivré par la commune.
đź§ Procédure
Postérieurement à la délivrance du permis, la commune a appris que le copropriétaire avait été condamné pénalement pour avoir sciemment menti sur l’existence d’une autorisation collective. Se fondant sur ces nouveaux éléments, elle a décidé de retirer le permis de construire.
Le bénéficiaire a contesté cette décision, invoquant l’expiration du délai de retrait.
âť“ Question principale de droit
L’administration peut-elle retirer, sans condition de délai, un permis de construire délivré à la suite d’une manœuvre frauduleuse du pétitionnaire découverte après la délivrance de l’autorisation ?
🏛️ Solution des juges
Le Conseil d’État répond par l’affirmative.
Il rappelle que :
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Les autorisations d’urbanisme sont délivrées sous réserve du droit des tiers (CE, 23 oct. 2020, n° 425457) ;
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En cas de fraude, le retrait du permis est possible à tout moment, sans que l’administration soit soumise au délai de 3 mois prévu à l’article L. 424-5 du Code de l’urbanisme.
La fraude est caractérisée lorsque le pétitionnaire a eu l’intention de tromper l’administration. Tel est le cas lorsque ce dernier prétend faussement détenir l’accord des copropriétaires pour obtenir l’autorisation.
📝 Enseignements pour les professionnels de l’immobilier
👉 Pour les syndics :
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Ils doivent veiller à délivrer, le cas échéant, des attestations ou autorisations claires, et alerter immédiatement la commune en cas d’usage abusif ou falsifié.
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Une absence de vigilance peut générer des contentieux lourds en cas de travaux réalisés sur la base d’un permis retiré.
👉 Pour les copropriétaires et promoteurs :
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Déposer un permis sans autorisation de l’assemblée n’est pas en soi une fraude… mais mentir délibérément sur cette autorisation expose à une condamnation pénale et au retrait rétroactif du permis.
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Les travaux réalisés sur la base d’un permis retiré peuvent faire l’objet d’une démolition.
👉 Pour les collectivités :
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Elles peuvent retirer à tout moment un permis frauduleux dès la découverte de la fraude, sans être contraintes par les délais ordinaires.
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L’arrêt sécurise leur action en leur offrant une base juridique solide pour lutter contre les manœuvres abusives.
🟡 À retenir
âś… Pas de délai de retrait pour les permis obtenus par fraude
📝 Intention de tromper = élément déterminant de la caractérisation de la fraude
🏢 En copropriété, la fausse déclaration d’autorisation des autres copropriétaires constitue une fraude justifiant le retrait du permis
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