Le syndicat responsable malgré une érosion naturelle du terrain

Publié le 11 octobre 2025 à 03:05

Cass. 3e civ., 4 septembre 2025, n° 24-10318, inédit

📌 Le principe dégagé

Le syndicat des copropriétaires peut voir sa responsabilité engagée en cas d’effondrement d’une partie commune dû à un phénomène naturel (ici, une érosion), dès lors qu’il n’a pas mis en œuvre une surveillance régulière et des travaux préventifs permettant d’éviter le dommage.
En outre, le copropriétaire victime est considéré comme tiers au contrat d’assurance de la copropriété et peut donc être indemnisé par l’assureur, nonobstant son appartenance au syndicat.

📖 Les faits

Une copropriété est implantée en bordure d’un terrain en pente. Une partie de ce terrain s’effondre, emportant une partie du jardin privatif d’un couple de copropriétaires. Ces derniers assignent le syndicat des copropriétaires et son assureur multirisque immeuble, afin d’obtenir :

  • la réalisation de travaux de confortement,

  • et la réparation de leurs préjudices matériels et de jouissance.

Un débat s’installe sur la qualification du terrain effondré : partie commune ou partie privative ?

⚖️ La procédure

  • La cour d’appel de Marseille rejette la demande des copropriétaires, estimant notamment que la responsabilité du syndicat n’est pas engagée, l’effondrement résultant d’un phénomène naturel d’érosion.

  • Elle refuse également la mobilisation de la garantie d’assurance, considérant que les copropriétaires victimes ne peuvent être indemnisés en qualité de tiers lésés, puisqu’ils font partie du syndicat assuré.

❓ La question principale de droit

Deux questions étaient soumises à la Cour de cassation :

  1. Le syndicat peut-il être tenu responsable d’un dommage causé par l’érosion naturelle d’un terrain ?

  2. Le copropriétaire victime peut-il être considéré comme un tiers au contrat d’assurance de la copropriété et être indemnisé à ce titre ?

🧾 La solution des juges

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel :

  1. Elle retient la responsabilité du syndicat, au visa des articles 14 et 14-1 de la loi du 10 juillet 1965, en considérant que :

    • le dommage est imputable à l’insuffisance de surveillance et de travaux préventifs,

    • la cause naturelle (érosion) n’exonère pas le syndicat dès lors qu’il avait la possibilité d’agir.

  2. Elle juge que le copropriétaire victime est un tiers au contrat d’assurance souscrit par le syndicat :

    • la qualité de membre du syndicat n’exclut pas celle de tiers lésé,

    • l’assureur ne peut donc refuser sa garantie au motif que la victime fait partie du syndicat.


🧠 Enseignements pratiques pour les professionnels de l’immobilier

👉 Pour les syndics

  • Mettre en place une surveillance régulière des parties communes, notamment lorsqu’elles présentent des risques naturels (terrains en pente, falaises, berges, murs de soutènement, etc.).

  • Anticiper les risques par des travaux de confortement ou d’entretien préventif, au besoin sur la base d’expertises géotechniques.

  • Conserver une traçabilité des inspections et décisions d’AG (ce qui peut jouer en défense en cas de sinistre).

👉 Pour les administrateurs de biens et gestionnaires

  • Informer les copropriétés de la nécessité de constituer une réserve budgétaire pour les travaux préventifs dans les zones à risque.

  • Vérifier les garanties du contrat multirisque immeuble, notamment sur les dommages aux parties communes et la définition des tiers.

👉 Pour les assureurs et courtiers

  • La qualité de tiers des copropriétaires doit être clairement intégrée dans l’analyse des risques et la rédaction des contrats.

  • Cette décision renforce la mobilisation possible de la garantie en cas de dommage causé à un copropriétaire par une partie commune.


📝 À retenir

✅ Un phénomène naturel n’exonère pas le syndicat s’il pouvait anticiper et prévenir le dommage.
✅ Le copropriétaire victime est un tiers au contrat d’assurance, pouvant bénéficier de la garantie au même titre qu’un tiers extérieur.

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