
Références de l’arrêt
Cour de cassation, 3e chambre civile, 22 mai 2025, n° 23-19.387
Le principe dégagé par l’arrêt
Le délai de prescription en matière de transformation illicite d’un lot en copropriété ne court pas à compter du simple changement d’affectation, mais à partir du moment où le syndicat des copropriétaires a eu connaissance de la dangerosité que cette affectation représente, notamment au regard des règles de sécurité.
Les faits
Des copropriétaires avaient acquis plusieurs lots situés au dernier étage d’un immeuble, qualifiés de « débarras » dans le règlement de copropriété.
Ils avaient entrepris de transformer ces espaces en logements, malgré un accès étroit par escalier, posant un risque en matière de sécurité incendie.
La procédure
Le syndicat des copropriétaires a contesté cette transformation et a assigné les copropriétaires afin d’obtenir la remise des lots dans leur état initial.
Les copropriétaires se défendaient en invoquant la prescription de l’action, prévue par l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, anciennement fixée à 10 ans (ramenée à 5 ans depuis la loi ELAN du 23 novembre 2018).
La question principale de droit
À partir de quelle date commence à courir le délai de prescription de l’action du syndicat en cas de changement de destination d’un lot en copropriété ?
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Dès la connaissance du changement d’affectation ?
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Ou seulement lorsque la copropriété découvre que ce changement engendre un danger ou une non-conformité réglementaire ?
La solution des juges
La Cour de cassation valide la position de la cour d’appel :
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Le délai de prescription n’a pas commencé à courir à la date de la transformation ou de la simple connaissance de celle-ci par le syndicat.
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Il court uniquement à compter du 24 mai 2017, date à laquelle un rapport d’architecte, consécutif à un incendie, a révélé la dangerosité de l’affectation.
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L’assemblée générale du 3 juillet 2017 avait en outre interdit expressément l’usage d’habitation pour ces lots.
Les copropriétaires ne pouvaient donc pas se prévaloir de la prescription.
Enseignements pour les professionnels de l’immobilier
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En copropriété, la prescription ne protège pas automatiquement les transformations illicites réalisées sur des lots.
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Le point de départ du délai dépend de la prise de conscience par le syndicat de la non-conformité et de sa dangerosité, et non du seul constat d’un changement d’affectation.
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Les administrateurs de biens et syndics doivent être attentifs :
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Les changements de destination non autorisés peuvent être contestés plusieurs années après leur réalisation, dès lors qu’un risque est identifié ultérieurement.
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Les résolutions d’assemblée générale précisant les usages interdits renforcent la sécurité juridique du syndicat.
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Pour les agents immobiliers, une vigilance particulière s’impose lors de la commercialisation de lots atypiques (combles, chambres de service, débarras) : le risque d’action du syndicat demeure, même après plusieurs années d’occupation.
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