Transformer ses WC en douche sans autorisation : une faute grave justifiant l’expulsion

📚 Référence de l’arrêt

Cour d’appel de Paris, pôle 4, chambre 4, 25 octobre 2022, n° 20/03687

⚖️ Principe tiré de l’arrêt

Un locataire qui réalise des travaux importants sans autorisation du bailleur, en altérant la structure ou la destination des lieux loués, commet un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du bail et son expulsion immédiate, sans possibilité de maintien dans les lieux.

🏗️ Les faits

Une locataire d’un appartement parisien a transformé les WC du logement en douche à l’italienne, sans obtenir la moindre autorisation du propriétaire.
Les travaux consistaient notamment à créer une chape en béton de 24 centimètres d’épaisseur, destinée à accueillir les évacuations encastrées de la nouvelle douche.

Une expertise a révélé :

  • que les canalisations n’étaient pas accessibles en cas de fuite ;

  • que la copropriété n’avait pas été informée ;

  • que le poids total du béton avoisinait une tonne, générant un risque pour la solidité du plancher.

La question principale posée aux juges

Un locataire peut-il être expulsé pour avoir effectué, sans autorisation, des travaux lourds dans un logement, altérant sa structure et sa destination, même si ceux-ci répondent à ses besoins personnels ?

🧑‍⚖️ La solution de la cour d’appel

La cour confirme la résiliation du bail prononcée en première instance et ordonne l’expulsion de la locataire, au motif que :

  • Les travaux réalisés sont lourds, dangereux, et ont modifié l’affectation des pièces du logement.

  • Aucune autorisation du bailleur ni information à la copropriété n’a été délivrée.

  • La locataire n’a pas agi de bonne foi, car elle n’ignorait pas qu’une autorisation était nécessaire.

Considérée comme occupante sans droit ni titre, la locataire ne peut bénéficier du maintien dans les lieux.

📌 Enseignements pour les professionnels de l’immobilier

1. Le bail n’autorise pas tout :

Même si un locataire occupe paisiblement les lieux, il ne peut modifier leur structure ou leur destination sans autorisation écrite du propriétaire. Toute transformation importante engage sa responsabilité, surtout si elle met en péril l’intégrité du bien ou de l’immeuble.

2. L'absence d'autorisation est un manquement grave :

L’installation d’une douche en lieu et place de WC peut sembler anodine mais constitue, juridiquement, un changement de destination qui doit faire l’objet d’un accord exprès du bailleur.

3. Le critère de bonne foi est central :

La mauvaise foi du locataire (absence d’information, méconnaissance volontaire de ses obligations) aggrave son sort, au point de priver le juge de toute possibilité de clémence.

4. L’expertise technique est déterminante :

Dans ce type de litige, le recours à une expertise judiciaire permet d’établir le caractère non conforme, dangereux ou irréversible des travaux, justifiant ainsi la résiliation.

🧩 Conclusion

Ce contentieux rappelle que la liberté du locataire a des limites strictes, et qu’un simple aménagement mal encadré peut suffire à justifier son expulsion.
Pour les professionnels (gestionnaires locatifs, bailleurs, syndics), la vigilance sur les transformations opérées dans les logements est une nécessité. Et pour les locataires : l’autorisation écrite du propriétaire est toujours une sécurité juridique.

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